Pour les quelques lignes qui vont suivre j'emploierai le
vouvoiement, je ne sais pas pourquoi mais je ne peux pas faire autrement.
J’ai craqué, je n’ai pu m’empêcher de lire votre recueil, je n’ai pas
votre talent donc je sais parfaitement que mes mots ne pourrons jamais exprimer
l’intensité de mes émotions quand je l’ai lu mais je peux seulement vous dire
que c’est un hommage aux femmes magnifique. Je pense que dans vos poèmes,
chaque femme, aussi différentes soient elles, peut se retrouver, en tout cas
c’est ce que j’ai ressenti, je me suis souvent mis à rêver que j’étais l’une d’entre
elles. Bien sûr quelques poèmes me heurtent, par pudeur sans doute, mais ils éveillent
en moi de manière plus ou moins consciente des émotions inavouées. En tout cas
j’ai ressenti cette passion dont vous me parliez hier soir à travers la lecture
de vos textes et je vous en remercie. Ce que j’admire des auteurs comme vous c’est
précisément de savoir mettre des mots sur ce que les êtres ressentent. Même si
je ne me suis pas reconnue dans chaque vers j’en ai apprécié l’intensité et la
sincérité. Merci…
Bruno Thiévet.
Un nom, un homme, une relation à la femme.
A travers les lettres, l'auteur cesse presque d'exister dans son individualité
pour s'exhiber dans la passion universelle, alors même qu’il y accomplit tout
son être. Après tout, qui mieux qu'un homme pour parler de la femme. Qui mieux
qu'une femme pour éprouver un homme. Croyant se placer en posture de prédateur,
le jeune homme se fourvoie, il se fait la proie de sa propre proie, et dans sa
course à la survie, gagne en innocence. La pureté et la virginité se révèlent où
on ne les attendait plus. L’artiste redessine les courbes de la femme à coup de
lignes impétueuses, celles de la relation amoureuse. Parce qu'il n'est question
que de cela : d'amour. Quand les étreintes se font lutte, entre révolte et
soumission, c'est l'amour qui jaillit des orifices et Bruno cerne l'émulsion du
corps féminin comme peu d'autres le font. Il nous offre des bribes de sa vie,
s'en débarrasse aussi, s'en allège dans notre lecture. Et finalement, il
arrache nos souvenirs, enfonce les portes de nos vies, en publie les caresses
comme les plaies. A ce titre, cette œuvre est à lire comme un échange
incessant, entre lui et vous, son histoire, votre histoire, l’histoire de l’humanité
en somme. Valsez de la fragilité à la violence, de la domination masculine à sa
faiblesse, entrez, n’hésitez plus, entrez dans la démesure. L’auteur a
magnifiquement imbibé le papier de ses sentiments. Ses aventures amoureuses
fusionnent avec l’ouvrage comme ses membres et ses amantes d’autrefois, alors
ne vous étonnez pas si le vertige vous prend, laissez vous cueillir, c’est le
seul mode d’emploi s’il en est un pour pénétrer l’univers de Bruno Thiévet.
Cet homme est pour moi encore un étranger,
et ma petite participation face à son grand talent une bénédiction de sa part.
Malgré notre différence d'âge, je le trouve étonnamment fougueux. De tout son
art ressort une jeunesse que je n'aurais moi même jamais aussi flamboyante. Tu
ne peux rien nier de ton bagage de musicien : à chaque rime, ce sont les chaires
que l'on entend claquer et, de concert, le pouls du partenaire qui résonne. La
femme : ta fascination de toujours, ton obsession souvent, et ta perte
parfois. Pour moi tu te cherches Bruno, à travers tout ce parcours que l'on
fait avec toi. Je n'aurais qu'une requête à te faire : si cela peut t'inspirer
encore, ne te trouve pas, pas tout de suite. Puise encore dans les femmes que
tu peux rencontrer car ta cleptomanie est toujours respectueuse. Tes muses font
corps avec le recueil et y laissent un peu de leur peau, sublimées.
A toi Bruno, un grand merci, que tes amours se perpétuent et te comblent.
Aux hommes que j’invite à plonger dans un regard incroyablement masculin et qui
- au zénith du paradoxe - nous en apprend encore sur les inépuisables ressources
du deuxième sexe.
A toutes les lectrices, je vous défie de ne pas tomber, rien qu'un peu, sous le
charme de ce nouvel amant qui entre dans votre chambre en même temps que son
livre. C'est perturbant, presque intrusif mais toujours réciproque : entrez dans
son intimité comme il va entrer dans la vôtre.
Alors attention aux coups de foudre, Mesdames, Messieurs, car ce recueil est électricité.
Alexandra
SARRAZIN
Il n’y a pas de plus belle chose au monde que l’amour,
pas de meilleure chose au monde que le sexe, ni plus fascinante chose au monde
qu’une femme. Et quoi de plus troublant qu’un homme qui puise toute son énergie,
son inspiration et son talent dans ses faiblesses en amour, son goût pour le
sexe et sa passion pour les femmes ? Les textes de Bruno Thiévet sont plus
que des hymnes à l’amour, plus que des éloges à la beauté, à la féminité et à
la luxure. Ils font honneur à tout ce que représente la femme, en elle-même, et
aux yeux d’un homme. Chacun des écrits couchés sur ces pages fut inspiré par
une femme. Une rencontre furtive, une amie, une amante, une passion, un
chagrin. Et là réside toute la richesse de ses inspirations. Comment ne pas
flancher pour les écrits d’un homme qui dépeignent sa plus grande faiblesse
dans le corps d’une femme ?
Ce n’est pas tout à fait par hasard que j’ai fait la
connaissance de Bruno, disons que ce fut grâce à un heureux concours de tristes
circonstances, et aussi peut être bien à cause d’une curiosité un peu trop
maladive de ma part. Comme quoi ce n’est pas toujours qu’un vilain défaut. Nous
avons par la suite beaucoup conversé, jamais vraiment à propos de nous, mais
surtout d’un sujet qui permet bien vite de découvrir le plus profond d’une
personne : l’amour, le mal d’amour. J’ai ainsi pu déceler en Bruno un homme
à la sensibilité à fleur de peau, dont ni la honte ni l’orgueil ne pouvaient l’empêcher
d’exprimer même ses sentiments les plus violents. Un homme au cœur blessé, par
l’une de ses femmes dont il fait honneur plus loin dans ces pages. Un homme éperdument
amoureux. Un homme passionné, tiraillé entre la tendresse et la colère, entre l’envie
d’aimer et celle d’abîmer.
Passionné est probablement le mot qui suffirait à résumer
le personnage de Bruno, son œuvre, la relation si intime et singulière qu’il
partage avec l’Art, et, surtout, sa relation avec les femmes. Bruno n’est pas
un simple poète. Il est un artiste accompli. C’est en cela que son œuvre est si
particulière. Féru de musique, de cinéma, de photographie, de littérature, un
tel personnage mérite attention et renom qui s’imposent. Eternel jeune homme,
il donne un aspect intemporel à son œuvre quant à la jeunesse de ses
inspirations et de son entourage. C’est un univers un peu unique en somme,
utopique, presque parfait s’il n’y avait pas ces blessures au cœur et à l’âme.
C’est univers d’amour, de luxure, de jeunesse et de beauté. Une évasion, une échappée…
Emilie Bacher Deschryver
A la lisière de la forêt de buildings, tapi à l’ombre d’un hall
d’immeuble haussmanien, dans cette capitale sauvage, un chasseur d’images, de métaphores,
est prêt à bondir sur l’aventure. Soudain, il la chope à la gorge, la griffe,
la dévore puis prend sa vie, la poésie.
Monstre sentimental que ce Bruno T.
toujours à l’affût d’un bon mot ou d’un cul à croquer sur le papier. Vorace prédateur,
parfois rongé par les remords, souvent fourbu, mais toujours partant pour une
chasse nocturne. Même si sa belle, son oiseau de proie le rejette sur les
parois de son désespoir . Bon joueur pour ce soir il regarde la gazelle
qui s’enfuit dans le noir.
Il retombe
sur ses pattes, car les jeunes fauves deviennent des chasseurs solitaires, des
ours mal léchés.
Entre deux courses effrénées au
volant d’une jaguar, Il est vulgaire comme une pute à la croisée des boulevards
ou élégant comme une femme du monde qui se maquille face au miroir. A vous de
voir, à vous de lire, à vous de dévorer la partie du bonhomme qu’il vous plaira
de mâcher.
Nous lisons
avec plaisir les textes tirés de cette boite noire , de tant d’années d’accidents
du cœur, quand il s’écrase à proximité du bonheur.
Mais méfiez vous mesdames, il tourne
comme un lion en page, le stylo entre les dents, attiré par l’odeur du sens.
Restez donc à l’écart du félin
efflanqué qui rode dans votre cage d’escalier , ne sortez pas de votre réserve,
ne troublez pas cette espèce en voie d’extinction. Surtout, ne jetez pas de
nourriture à cet animal. Il suit un régime très spécifique à base de rimes
riches qu’il cultive au contact des biches.
Enfin,
laissez donc cet écrivain sauvage livre de ses mouvements…
Le vent s'est infiltré dans ta robe Bleu ciel Sa danse sensorielle ensoleille l'été
En bas de la falaise la mer s'est agitée Je lâche mon trapèze et je viens t'embraser
VENT D’IVRESSE
La plage est à perte de vue Je te regarde devant moi Tu envisages les coquillages Plutôt que l’horizon perdu
Le vent s’éprend de tes cheveux Tandis que la mer perd sa voix Face à tes yeux sur le rivage Qui plongent dans ceux de l'homme heureux
Marchons, veux-tu, sans autre but Que de laisser l’ivresse en soi Monter jusqu’aux dunes sauvages Où nous chavirerons sans lutte
Jusque là, j’ai le cœur en feu De t'avoir pendue à mon bras Sous l’œil en flammes de l’orage Je t'adore au-delà des cieux
LA LIQUEUR DU FAUVE
Chevauche-moi Et je m’abandonne à ta sauvage élégance
Les esprits alentours matent ton cul à l’air Et nous laissent -toi et moi- tout à l’intimité de nos grands regards fauves
Dévisage-moi, je suis ta proie Tes doigts s'éventaillent sur mon ventre et mon torse Tandis que des rayons solaires viennent s’habiller dans tes cheveux
Tu entrouvres la bouche, te relaies à la souche Et tes yeux qui se fourchent me recherchent à la source
Tu te joues de l’instinct qui habite tes mains Tu veux lire sur mes traits mes secrets volcaniques
Tu veux me voir trinquer Tes lèvres veulent tremper et boire à ma santé
Tu es aux premières loges pour me voir arriver Et dès lors que je suis sur le point de ta langue Sur le point de venir Tes commissures, mon ange M’étreignent et m’ordonnent de jaillir
Tes yeux encanaillés me livrent à ton bûcher Je signe ta victoire de grands tracés de jets
Big bang déployé J’appartiens désormais à un nouveau cosmos Constellé des étoiles de ton petit bracelet
L'ECHAPPEE BELLE
On l'aura notre échappée belle..
Je suis dans ta roue Tu prends tout le vent de plein fouet Tu te tournes vers moi le visage inondé de cheveux affolés et tu te mets à rire sans discontinuer sous le ciel menaçant..
Le coeur bluesy, serein je m'étonne et je m'enchante d'être à ce point vivant..
Nous ne sommes plus très loin de chez nous à présent
MELE-ANGES
Laisse-moi te laver doucement les cheveux Voir ton âme glisser, s'assoupir peu à peu, Et bientôt s'éveiller aux ondes de ta source Dans un bain exalté de parfums et de mousses
A tes yeux caressants, laisse-moi m'arrimer Planter l'ancre enlisée, dans l'instant éternel Dans l'instant frémissant, de cantiques charnels Je veux me mélanger aux couleurs que tu crées
Laisse-toi entraîner, aux abysses d’un rêve Détrempé à ces nuits aux volutes sans trêve Que j’aime voir tinter à tes grâces réelles
Offre-moi ce qu’aucune n’a songé à donner Et reçois sous la lune les archanges d’été Qui nous hissent éblouis jusqu’à l’ultime ciel
PETITE REVERIE DU MATIN
Dans sa grande chemise à rayures un déhanché en guise de parure La belle traverse la pièce sûre de son coup
Je la sais nue sous le tissus Bleu Deauville et blanc de haut en bas dedans
Et je la suis déjà dans son petit sanctuaire où des clous de girofles ornent sa cuisinière
Aux mouvements circulaires de la cuillère en bois la petite casserole est déjà aux abois
Pieds délicats jambes de soie posture de cigogne je jaillis sans vergogne
Me voilà dans son dos sur son cou et bientôt dans sa grande chemise
Bleu de Klein glissant de haut en bas dedans
HOLD UP
J'ai envie d'un hold up Envie de te fouiller, de dévaliser ton corps, venir dans ton dos, te parler sèchement à l'oreille, te mettre en joue, puis à terre, t'attacher, t'engueuler te regarder crier en fermant les yeux sous les coups de pétard jusqu'à contempler enfin tout ce liquide sortir du fond des sacs..
INEFFABLE VERTIGE DES VICES INASSOUVIS
Ses couilles qui claquent à ton cul Ta mouille qui laque tes cuisses Le sang du mois répandu Au blanc du drap des sévices
Vous en aviez envie Il savait recevoir Tu as passé trois nuits A remonter la barre
Réclamant la saillie Jusqu’à l’heure du départ L’enfermant de chez lui Sa clef dans ton bavoir
Sa queue d’un coup dans ton cul Muqueuse à même muqueuse Il crache sans retenue Comme dans ta gorge poreuse
Qu’en dirait ton chéri Que tu aimes plus que tout Mais qui te contrarie Qui t’a poussée à bout
Ses kiffs inassouvis Sont du coup pour le loup Qui te prend sans répit Qui te prend sans tabou
A peine dix-sept ans Cialys Thaïlandaïs Speed & Poppers aidant A tes abus d’excès
Je te rejoins bien là A me sabrer la nuit Toi qui servais le plat Au-delà de l'envie
Urologie sous la douche Photographie de ta bouche Te revoilà sur le net En caméra indiscrète
Caresses insidieuses Sur soutien gorge brodé Poitrine malicieuse A chacun dévoilée
Crescendo langoureux Sous lampe tamisée Les loups mordent leur queue Se perdent à te trouver
Reine de la défonce Héroïne de la nique La seringue s’enfonce Et deux frelons te piquent
Sanglée comme animal Qu’on veut tenir en joug Tu roucoules ton râle Etranglée dans la boue
Puis ma rencontre avec toi A t'écouter larmoyer Le sort accablant le roi De noces non consommées
C'était un Jeudi soir sur une largeur de lit Nuit où j'ai contemplé ton visage endormi J'ai respiré ton souffle, pris un peu de ton âme En moi s'est incarnée l'inaltérable flamme
A LA GRACE DE TON EMPIRE
Je cherche mes armes pour te conquérir Recherche des armes à en dépérir
Je vois parmi tous mes amis Un animal qui te ressemble Je déteste ma jalousie Et je m’éteins lorsque tu flambes
Je garde mes larmes derrière mes soupirs Tarde dans mes larmes quand le soir m’aspire
Je vois parmi mes ennemis Un arc en ciel qui me ressemble Et qui bientôt se désassemble Au souvenir d’un bon ami
Du fond de mon âme, je veux ton sourire Au fond de mon âme, il manque un empire
Je vois venir en bout de nuit Une fée familière qui semble Entre mes mains trouver son nid Et qui m’étreint lorsque je tremble
Rencontrer tes yeux, parmi les communs M’a brûlé du vœu, d’y voir mon destin
LA FEMME-REFUGE
Je cherche un refuge, Un havre isolé par la brise Une vallée minérale, blanche comme l’instant D’une harmonie parfaite entre les éléments
Je rêve de canyons délavés de lumières De clairières paisibles aux sommets des enfers
Fais de moi un parfum sinueux, long courant ensablé Rouge comme la terre des déserts massifs Rouge comme les étoffes profondes, ivres d’Andalousie
Laisse moi m’enrouler dans les anneaux du vent Survoler les reliefs de ton corps émouvant
Je cherche un domaine La douceur d’une flore ondulant dans l’azur Déployant ses pollens aux âmes tourmentées
Je veux m’abandonner à tes lianes aux nervures de plumes Laisse-moi me répandre comme un lac fluide Au diapason des pulsations Des oraisons de tes pulsions
Fais-moi boire au parfum de ton cou L’élixir qui sauvera mon âme fatiguée Permets-moi de venir me cacher dans ta chevelure Il me faut expier mes tensions Somnoler près d’une source pure
Je viendrais alors m’enrouler dans les vapeurs de ton être Espérant voir tes lèvres curieuses partir en promenade, Et tomber en chemin sur celles du soldat Chuchotant dès lors, dans tes bras providentiels Ses plus secrets soupirs.. Fleur de nacre, offre moi ton haleine orangé Je suis un animal en mal de chaleur
Je te donne la poudre Pour que tes yeux dessinent leurs intenses désarrois Dans les tréfonds –cavernes- de mon âme
Referme toi sur moi Comme un coquille de mer sur un cristal de vent
Je veux aveuglément parcourir de mes mains tes surfaces sensibles
Nez à nez sur ton sein J’y passerai ma joue J’y poserai mes lèvres J’y risquerai la main -De féline à félin-
J’attendrai cet instant Où chaque fleur volcanique Jaillira en flammes de torrents Et me prendra dans des griffes sublimes
Je veux sentir tes dents de tigre m’attraper de plein fouet à la nuque
Révèle moi à moi-même Sous tes doigts, je te laisse conjurer l’anathème
Couchons nous au milieu de l’infini rivage Dans l’oblique de la tombée du soir Et laissons le flux et le reflux de nos envies fantasques Emporter les coquillages fêlés de nos amertumes De nos questionnements et de nos angoisses
Devenons un paysage noble et scintillant Narguons le cœur de la nuit d’un plus parfait cristal
ETERNEL INSTANT
Je rêve d’une chambre aux blancheurs épurées Construction de drapés pris aux reflets de l’ambre Pris aux flammes qui tremblent à tes yeux magnifiés Comme fleur de rosée sous l’orage se cambre
Je voudrais déposer dans l’éternel instant Sur ton ventre troublant ma pudeur insensée M’enrouler comme un lierre à ton désir brûlant D’absorber le tonnerre dans un fracas violent
Laisse-moi déployer cette ivresse animale Qui vient s’abandonner sur ton épaule pâle Dans ton cou s’engouffrer et s’offrir à trépas
O mourir et renaître comme chat du Népal Te retourner, te mettre plus de sept fois sous moi Jusqu’à me reconnaître au plus profond de toi
CREPUSCULE D'UNE REVERIE
Je t'ai regardée t'endormir dans ton coin..
Dans mes rêveries, il y avait eu des prairies, des pétales de fleurs mélangés aux pollens, - papillons rouges et herbes folles - l'heure calme aux premières déclinaisons du jour.. Des faisceaux de soleil venaient enrubaner ce gros chêne où je t'imaginais adossée, un léger sourire aux lèvres..
Dans les fantaisies du vent nous nous serions laissés aller à la douce ivresse de ce havre...
AMOUREUSE
Elle tombe amoureuse Mieux qu'elle ne sait aimer Et elle sait s'attacher Mieux que d'être amoureuse
FEMMES DE MA MORT
La femme de ma vie Ne me reconnait plus Quand reviendra l'envie Je ne l'aimerai plus
La femme de ma vie Est choyée, que veux-tu Je lui offrais ma vie Contre son temps perdu
La femme de ma vie Ne m'a pas convaincu De garder en sursis Son grand ami déchu
La femme de ma vie Ne me regarde plus Et je livre à la nuit La flamme qui me tue
TALISMAN
Je te vois Assise là Tes yeux pris dans le lointain Et je t'y rejoins Malgré moi
Je me vois Près de toi Les yeux pris par le chagrin Tu m'y as contraint Malgré toi
Et lorsque tu t'en iras Je te porterai déjà Comme un talisman en moi
J'ai longtemps Cru vraiment Que nous aurions cet enfant Qu'on s'inventait les Yeux brillants
L'ironie De l'amour T'a gagnée au fil des jours Mais m'a épargné Sans détour
Et lorsque tu t'en iras Je te porterai déjà Comme un talisman en moi
Je ne retiens que mes pleurs Je te souhaite le meilleur Du plus profond de mon cœur
DELESTEE
Je regarde du port partir un grand vaisseau il frôle l'écume vole au-dessus des eaux
Je regarde du port ton immense sourire qui me tourne le dos qui disparaît bientôt à l'horizon
Le soir vient se poser doucement sur le ciel de septembre Je tremble d'affronter le néant de ma petite chambre
Mon seul chez-moi s'en est allé je reste là à tituber à m'entre-déchirer de souvenirs bleutés
Accablé de fatigue je m'endors près des digues Je te vois habillée de célestes blancheurs des étoiles par milliers comme des dames d'honneur viennent pour te guider
Le petit jour hésite à rêveiller quelques vieillards qui dorment sur les bancs L'un d'eux a pris le large la nuit durant Il a rejoint son rêve à tout jamais ensorcelé
MARINE
Tes yeux débordent Marine Tes yeux débordent Et quand tu m’abordes Marine Tu me sabordes Et je m’incline
Ton cœur déborde Marine Ton cœur déborde De tes jolis yeux Mais tu tiens bon Marine Tu tiens bon Du mieux que tu peux
Et je te regarde Puis je te regarde Et je me perds un peu Dans quelques mers agitées Mais je ne cherche pas terre Je me laisse juste porter Je m’en remets au vent de ta valse marée
LE SOMNOLEUR
Offre-moi une nuit De sommeil avec toi Tu feras d’un banni Le plus heureux des rois
Celui de qui tu jouis N’a pas rêvé une fois Comme je rêve chaque nuit De dormir près de toi
Offre-moi une nuit De gestes délicats Ressuscite ma vie Au sein de ton climat
Je ne sais me lasser Du parfum de tes yeux Des chemins familiers De ton corps cotonneux
Offre-moi une nuit De rêv’ries contre toi L’émotion nous unie, Comm' les voiles d’un haut mat
Quand bien même tu te plais A vibrer pour un autre Je meurs et je renais, Je reste ton apôtre
Offre-moi une nuit, Tu me délivreras Je somnole une vie Qui n’attend que tes bras
AUTO-PSY
On veut voir grand, beaucoup trop grand dans des yeux grands comme les tiens on se méprend bien trop souvent pour des moments opportuns
Lorsqu'on croit voir une oasis on imagine déjà la plage Nous nous infligeons le supplice de peindre nous-même nos mirages
Mais dans ces instants de bonheur c'est notre désert qui s'efface Un désert sans couleur Sans chaleur et sans grâce
Souvent le désir n'a rien de mieux que le besoin souvent les vampires ont de grands yeux pareils aux tiens
Sur le coup je m'indigne mais mes dents m'égratignent On oublie un peu vite les tricheries tacites
On se relève la fatigue dans le corps de nouveaux rêves nous traînent à notre sort
Des rêves trop vieux pour être vains et beaux à pâlir Souvent les vampires ont de grands yeux pareils aux miens
GOTHICTALOPICIA
La fin du jour est proche Mon désir ricoche Jusqu'aux portes d'un lieu Abandonné du ciel
Intenses vitraux bleus Je vous dois le respect Aucun de moi ne veut Entrecroiser le fiel
Je suis seul parmi vous A moins que dans mon dos Un chuchotement doux Murmure qu'il est trop tôt
Elancée de l'abside Comme incarnée du soir Une nymphe en toge noire Se réclame d'un guide
Aux croisées du transept Six autres femmes guettent Une puissante aura Prend possession de moi
Quatorze mains gracieuses Cheminent, voluptueuses Incendient dans mon sang Les plus anciens volcans
La pénombre installée Exulte à dévoiler quelques troublants secrets De la perversité
LE HARPON
Je vais à la pêche au regard là, j’en tiens déjà un porte-parole de tout un corps en ébullition Je t’ouvre ma boîte crânienne Allez, plonge dans mon antre Vois déjà, tu n’as plus en bouche le goût de l’hameçon sinon celui du harpon
Petite sirène, je chante de ta propre voix ta fameuse chanson
MON DERNIER SECRET
Tout respire chez toi La féminité Ca transpire en moi A en suffoquer !
Je veux voir ta main Taillée dans la soie Fouiller mon écrin Sans égard pour moi !
Depuis tout ce temps Tu les séquestrais Libère à présent Tes désirs secrets
Depuis trop longtemps Tu es affamée Montre moi tes dents Je veux en baver !
Tout ton corps me broie De sensualité Tes yeux me foudroient De flammes insensées
Ta délicatesse est brutalisée J’empoigne d’hardiesses Tes fichus attraits
Ma délicatesse Est azimutée Délivre à l’ivresse Mes foutus péchés !
Dans la flamboyance Des jardins secrets Notre décadence Est un lien sacré
Et si le bas blesse En absurdité Je livre sans reste Mon dernier secret
LUNE D’ELLE
J'ai sans doute croisé Un jour dans Paris La femme de ma vie Sans la remarquer
La foule de Paris Comme une mar ée Garde dans son lit Ses plus beaux secrets
J'aimerais savoir Vaincre les remparts Qui viennent le soir Hanter ma mémoire
Il y a des regards Qu'on rêverait De garder le soir Sur ses poignets
Cette nuit nos yeux Tremblent et se blessent D'échanger le voeu D'une caresse
Je n'ose espérer Croire ce que je sens Ta couleur me plaît Marque-moi au sang !
TA PEAU
Ta Peau constellée de songes de papillons ineffables et de marécages fourbes Me voilà enlacé à ta sérénité je suis fou de ta quiétude ! Elle brille en chaque étoile qui coule lentement du ciel pour s'enrouler sur toi comme un serpent sans yeux tout assoiffé du sel exquis de tes instincts.. Ta peau irradie chaque secret de mon écorce Ta peau ensommeillée au coeur même de l'écrin -électrique et filandreux- de tes actes manqués Ta peau, temple massif aux rosées de carats Ta peau aux yeux centuples se répand sur le soir Souterraines galeries de ton corps alangui déverse ses parfums aux spasmes de tes reins Je porte la morsure des fleurs carnivores qui dorment sous ton derme, flamboyant à l'aurore; Ta peau, tous tes écrins tressés, tes ports, tes flacons de rivages tous tes drapeaux au vent, tes chansons chuchotées Ta peau comme un radeau de sang sur un torrent de lave Ta peau comme un cygne sans lac comme une forêt de cris crépitant litanies Magie ! Vertigineuse ivresse de ta nacre tannée ta peau ta peau étrangle ma trachée et coupe mon élan mais je m'étends pourtant, je tends infiniment vers toi ravalant le désir le grand, le vrai désir est d'être ravalé ! comme la mer remonte à elle comme l'écume explose avant de dire son nom avant d'écrire son nom sur les vapeurs de peau de la matière du temps Laisse-moi dans l'instant prendre l'éternité de tracer mon destin sur ton axe troublant
LES PETITS CHATS
Je sais ta férocité avec les sentiments Lorsqu’il s’agit de les noyer Comme des petits chats
Ma cocotte, je voulais juste te dire Don Quichotte n’en finit pas de mourir
MES REVERIES
Aujourd’hui mes rêveries vont à la femme mûre qui a une amnésie de la passion future
FLEUR DE L’AGE
Rose-Marie et son chapeau affleurent traversent le square sans regarder le square
Partout l'été est là partout de jeunes femmes en fleurs narguent la robe à fleurs de Rose-Marie
De grands éclats de rires blessent la dame au dos une pie va surgir un homme a son chapeau
L'ILE DE RE -La flotte en Ré, fin septembre-
J’ai le cœur gros et plein d'images
Des rivages désertiques de Sablanceaux au Bois-plage touristique mais malgré tout si beau
Les patelins et les rues abandonnées me laissent à ton reflux sans destinée
De joies surestimées en naufrages hideux j'arriv' dans tes marées pour me laver les yeux
Ramener de La Flotte un fromage de chèvre, une bouteille de vin et ça me reprend, comment te dire ? Je me sens affreusement bien et affreusement seul près de toi
En longeant les chemins bordés de pins puis vélo à la main à Saint -Martin … Tout a l’air à la fois si vrai et inutile et c’est si difficile à accepter
Je regarde septembre de ma petite chambre Tel un fauve ensommeillé sur les terres Son oeil mauve vient s'enrouler sur la mer
Tout à l’heure je descendrai avec le soir pour venir te border Et je resterai là à contempler ton souffle
SUR LES COUPS DE MINUIT
Tu tournes autour de moi Avec de grands yeux froids Tu cherches Tu me flaires Tu me pistes
Je tourne autour de toi Mes mains tièdes s’emploient Se dispersent Et se perdent Sur tes pistes
Tu tournes une dernière fois Ton corps blanc contre moi Tu traces Je laisse faire Tu es triste
Je tourne dans ce coin là Où tu n’habites pas Je te cherche Je me perds Hors des pistes
NOCTURNE A CHOPIN
Les rues abandonnées au milieu de la nuit se souviennent en silence de femmes épanouies
Leurs sourires, leurs grâces et leurs charmes discrets portent une robe immense délicate et brodée
Dieu que leurs yeux sont tristes et bercés de tendresse lorsque le soir se glisse au cœur de leur détresse !
Dans un coin de l'hiver il trinque puis vacille s'éprend des réverbères qui célèbrent la nuit
Il songe aux grandes dames aux rêveries laissées près des lacs gelés où dorment bien des âmes
JE T’EMMENERAIS
Je t'emmènerais dans un ranch traire des vaches et regarder des chevaux d'enclos tourner sans fin au milieu de nulle part. Je t'emmènerais longer des montagnes immenses, partager le silence ébahi et cotonneux d'une contemplation émerveillée. Je t'emmènerais fumer le cigare offert par un très vieux Cubain en gage de ta beauté. Je t'emmènerais contre mon épaule sur un chemin de neige et de conifères, sous un ciel épuré d'azur, dans les rayons déployés du soleil triomphant. Je t'emmènerais dans les confidences de mes caresses incertaines, lorsque ton grain de peau entrouvre mon âme comme un coutelas divin. Je t'emmènerais chaque matin dans une rêverie légère pour dégager mon corps empesé de mon lit vide. Je t'emmènerais chaque jour comme un papillon de songe déposerait les pollens du parfum de ta main. Je t'emmènerais chaque nuit dresser le trois-mats des recouvrances, déposer la blanche candeur de la grand voile sur le parfum de mort de mes draps trop froissés. Je t'emmènerais dans le regard de chacun de ces hommes qui n'ont jamais échoué à jouir de ton corps et d'en abuser comme il se doit. Je t'emmènerais dans les vertiges du jour, à la pâleur d'une lampe, dans un miroir grimaçant et j'en détournerais mes yeux pour les fermer encore, alors.. Je t'emmènerais dans une prairie de jonquilles, de coquelicots et de bleuets, à déguster la brise dans les danses irréelles de ta robe diaphane, puis, ivre du chant des oiseaux, sous les branches d'un gros chêne, je m'endormirais pour toujours dans tes bras, bercé par la douceur des soupirs du printemps.. O, dans mes derniers instants, je t'emmènerais sur un ferry pour le bonheur de ton sourire sous un bonnet de laine. A l'autre bout du quai, on entrerait chez un vieil antiquaire, on sortirait de la poussière quelques boites à musique abandonnées çà et là par des femmes délestées de rêves trop usés.. Soudain, je reconnaîtrais la petite manivelle enfantine que tu m'avais offerte et je me tournerais brusquement vers ton absence.. Bien vite, j'actionnerais le petit bras mécanique pour sentir le crochet acéré de ma nostalgie remonter dans la chair de mes souvenirs.. Alors, depuis mon antichambre vide et sans écho, j'entendrais bientôt remonter les galops de cet enclos perdu au milieu de nulle part.. ..où je t'emmènerais..
CE N'EST PLUS MOI
Tu es assise à droite dans la voiture Le soleil d'été borde la route Ta fenêtre est ouverte et le vent ricoche à tes cheveux Tu parles à ton homme
Ce n'est pas moi Ce n'est plus moi
Quelqu'un sonne à ma porte Ce visage me dit quelque chose Tu me dis que je t'ai aimée un jour Comme jamais je n'avais aimé quiconque Que nous parlions de prénoms d'enfants en nous tenant la main Que je te désirais à en devenir fou
Mais ce n'est pas moi, ne sois pas triste, Ce n'est plus moi..
Tu es assise à la droite de tes enfants La clarté du soleil d'automne s'est figée sur la nappe Soudain, tu as comme le pressentiment qu'un être s'en est allé et l'instant se passe Tu es bien loin désormais de te demander
Si cela aurait pu être moi
Tu es assise à ma droite dans la voiture Tu passes ta main dans ma nuque Tu souris Je regarde la route ensoleillée Et je t'entends chanter Tu ris tendrement
L'azur ne m'aura jamais semblé aussi pur
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Bruno Thiévet - FEMME DE MA MORT -
Quinze années d'enthousiasme pour des mirages 94-09