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Bruno Thiévet - FEMME DE MA MORT -

19 mai 2009

Introduction


 

  Pour les quelques lignes qui vont suivre j'emploierai le vouvoiement, je ne sais pas pourquoi mais je ne peux pas faire autrement.

J’ai craqué, je n’ai pu m’empêcher de lire votre recueil, je n’ai pas votre talent donc je sais parfaitement que mes mots ne pourrons jamais exprimer l’intensité de mes émotions quand je l’ai lu mais je peux seulement vous dire que c’est un hommage aux femmes magnifique. Je pense que dans vos poèmes, chaque femme, aussi différentes soient elles, peut se retrouver, en tout cas c’est ce que j’ai ressenti, je me suis souvent mis à rêver que j’étais l’une d’entre elles. Bien sûr quelques poèmes me heurtent, par pudeur sans doute, mais ils éveillent en moi de manière plus ou moins consciente des émotions inavouées. En tout cas j’ai ressenti cette passion dont vous me parliez hier soir à travers la lecture de vos textes et je vous en remercie. Ce que j’admire des auteurs comme vous c’est précisément de savoir mettre des mots sur ce que les êtres ressentent. Même si je ne me suis pas reconnue dans chaque vers j’en ai apprécié l’intensité et la sincérité. Merci…

Caroline Bouette


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9 mai 2009

Tous droits réservés ( SNAC ; SACEM )

PREFACE


Bruno Thiévet.
Un nom, un homme, une relation à la femme.
A travers les lettres, l'auteur cesse presque d'exister dans son individualité pour s'exhiber dans la passion universelle, alors même qu’il y accomplit tout son être. Après tout, qui mieux qu'un homme pour parler de la femme. Qui mieux qu'une femme pour éprouver un homme. Croyant se placer en posture de prédateur, le jeune homme se fourvoie, il se fait la proie de sa propre proie, et dans sa course à la survie, gagne en innocence. La pureté et la virginité se révèlent où on ne les attendait plus. L’artiste redessine les courbes de la femme à coup de lignes impétueuses, celles de la relation amoureuse. Parce qu'il n'est question que de cela : d'amour. Quand les étreintes se font lutte, entre révolte et soumission, c'est l'amour qui jaillit des orifices et Bruno cerne l'émulsion du corps féminin comme peu d'autres le font. Il nous offre des bribes de sa vie, s'en débarrasse aussi, s'en allège dans notre lecture. Et finalement, il arrache nos souvenirs, enfonce les portes de nos vies, en publie les caresses comme les plaies.  A ce titre, cette œuvre est à lire comme un échange incessant, entre lui et vous, son histoire, votre histoire, l’histoire de l’humanité en somme. Valsez de la fragilité à la violence, de la domination masculine à sa faiblesse, entrez, n’hésitez plus, entrez dans la démesure. L’auteur a magnifiquement imbibé le papier de ses sentiments. Ses aventures amoureuses fusionnent avec l’ouvrage comme ses membres et ses amantes d’autrefois, alors ne vous étonnez pas si le vertige vous prend, laissez vous cueillir, c’est le seul mode d’emploi s’il en est un pour pénétrer l’univers de Bruno Thiévet.

Cet homme est pour moi encore un étranger, et ma petite participation face à son grand talent une bénédiction de sa part. Malgré notre différence d'âge, je le trouve étonnamment fougueux. De tout son art ressort une jeunesse que je n'aurais moi même jamais aussi flamboyante. Tu ne peux rien nier de ton bagage de musicien : à chaque rime, ce sont les chaires que l'on entend claquer et, de concert, le pouls du partenaire qui résonne. La femme : ta fascination de toujours, ton obsession souvent, et ta perte parfois. Pour moi tu te cherches Bruno, à travers tout ce parcours que l'on fait avec toi. Je n'aurais qu'une requête à te faire : si cela peut t'inspirer encore, ne te trouve pas, pas tout de suite. Puise encore dans les femmes que tu peux rencontrer car ta cleptomanie est toujours respectueuse. Tes muses font corps avec le recueil et y laissent un peu de leur peau, sublimées.


A toi Bruno, un grand merci, que tes amours se perpétuent et te comblent.

Aux hommes que j’invite à plonger dans un regard incroyablement masculin et qui - au zénith du paradoxe - nous en apprend encore sur les inépuisables ressources du deuxième sexe.

A toutes les lectrices, je vous défie de ne pas tomber, rien qu'un peu, sous le charme de ce nouvel amant qui entre dans votre chambre en même temps que son livre. C'est perturbant, presque intrusif mais toujours réciproque : entrez dans son intimité comme il va entrer dans la vôtre.
Alors attention aux coups de foudre, Mesdames, Messieurs, car ce recueil est électricité.

Alexandra SARRAZIN

 



   Il n’y a pas de plus belle chose au monde que l’amour, pas de meilleure chose au monde que le sexe, ni plus fascinante chose au monde qu’une femme. Et quoi de plus troublant qu’un homme qui puise toute son énergie, son inspiration et son talent dans ses faiblesses en amour, son goût pour le sexe et sa passion pour les femmes ? Les textes de Bruno Thiévet sont plus que des hymnes à l’amour, plus que des éloges à la beauté, à la féminité et à la luxure. Ils font honneur à tout ce que représente la femme, en elle-même, et aux yeux d’un homme. Chacun des écrits couchés sur ces pages fut inspiré par une femme. Une rencontre furtive, une amie, une amante, une passion, un chagrin. Et là réside toute la richesse de ses inspirations. Comment ne pas flancher pour les écrits d’un homme qui dépeignent sa plus grande faiblesse dans le corps d’une femme ?

  Ce n’est pas tout à fait par hasard que j’ai fait la connaissance de Bruno, disons que ce fut grâce à un heureux concours de tristes circonstances, et aussi peut être bien à cause d’une curiosité un peu trop maladive de ma part. Comme quoi ce n’est pas toujours qu’un vilain défaut. Nous avons par la suite beaucoup conversé, jamais vraiment à propos de nous, mais surtout d’un sujet qui permet bien vite de découvrir le plus profond d’une personne : l’amour, le mal d’amour. J’ai ainsi pu déceler en Bruno un homme à la sensibilité à fleur de peau, dont ni la honte ni l’orgueil ne pouvaient l’empêcher d’exprimer même ses sentiments les plus violents. Un homme au cœur blessé, par l’une de ses femmes dont il fait honneur plus loin dans ces pages. Un homme éperdument amoureux. Un homme passionné, tiraillé entre la tendresse et la colère, entre l’envie d’aimer et celle d’abîmer.   

Passionné est probablement le mot qui suffirait à résumer le personnage de Bruno,  son œuvre, la relation si intime et singulière qu’il partage avec l’Art, et, surtout, sa relation avec les femmes. Bruno n’est pas un simple poète. Il est un artiste accompli. C’est en cela que son œuvre est si particulière. Féru de musique, de cinéma, de photographie, de littérature, un tel personnage mérite attention et renom qui s’imposent. Eternel jeune homme, il donne un aspect intemporel à son œuvre quant à la jeunesse de ses inspirations et de son entourage. C’est un univers un peu unique en somme, utopique, presque parfait s’il n’y avait pas ces blessures au cœur et à l’âme. C’est univers d’amour, de luxure, de jeunesse et de beauté. Une évasion, une échappée…

Emilie Bacher Deschryver

                                                                                                                                                                        

 


    A la lisière de la forêt de buildings, tapi à l’ombre d’un hall d’immeuble haussmanien, dans cette capitale sauvage, un chasseur d’images, de métaphores, est prêt à bondir sur l’aventure. Soudain, il la chope à la gorge, la griffe, la dévore puis prend sa vie, la poésie.

Monstre sentimental que ce Bruno T. toujours à l’affût d’un bon mot ou d’un cul à croquer sur le papier. Vorace prédateur, parfois rongé par les remords, souvent fourbu, mais toujours partant pour une chasse nocturne. Même si sa belle, son oiseau de proie le rejette sur les parois de son désespoir . Bon joueur pour ce soir  il regarde la gazelle qui s’enfuit dans le noir.

Il retombe sur ses pattes, car les jeunes fauves deviennent des chasseurs solitaires, des ours mal léchés.

Entre deux courses effrénées au volant d’une jaguar, Il est vulgaire comme une pute à la croisée des boulevards ou élégant comme une femme du monde qui se maquille face au miroir. A vous de voir, à vous de lire, à vous de dévorer la partie du bonhomme qu’il vous plaira de mâcher.

Nous lisons avec plaisir les textes tirés de cette boite noire , de tant d’années d’accidents du cœur, quand il s’écrase à proximité du bonheur.

Mais méfiez vous mesdames, il tourne comme un lion en page, le stylo entre les dents, attiré par l’odeur du sens.

Restez donc à l’écart du félin efflanqué qui rode dans votre cage d’escalier , ne sortez pas de votre réserve, ne troublez pas cette espèce en voie d’extinction. Surtout, ne jetez pas de nourriture à cet animal. Il suit un régime très spécifique à base de rimes riches qu’il cultive au contact des biches.

Enfin, laissez donc cet écrivain sauvage livre de ses mouvements…

Jim Mentfakh 





9 mai 2009

34 ans / 34 textes





L'AIR EXULTA


Le vent s'est infiltré
dans ta robe Bleu ciel
Sa danse sensorielle
ensoleille l'été

En bas de la falaise
la mer s'est agitée
Je lâche mon trapèze
et je viens t'embraser









VENT D’IVRESSE


La plage est à perte de vue
Je te regarde devant moi
Tu envisages les coquillages
Plutôt que l’horizon perdu

Le vent s’éprend de tes cheveux
Tandis que la mer perd sa voix
Face à tes yeux sur le rivage
Qui plongent dans ceux de l'homme heureux

Marchons, veux-tu, sans autre but
Que de laisser l’ivresse en soi
Monter jusqu’aux dunes sauvages
Où nous chavirerons sans lutte

Jusque là, j’ai le cœur en feu
De t'avoir pendue à mon bras
Sous l’œil en flammes de l’orage
Je t'adore au-delà des cieux









LA LIQUEUR DU FAUVE


Chevauche-moi
Et je m’abandonne à ta sauvage élégance

Les esprits alentours matent ton cul à l’air
Et nous laissent -toi et moi- tout à l’intimité de nos grands regards fauves

Dévisage-moi, je suis ta proie
Tes doigts s'éventaillent sur mon ventre et mon torse
Tandis que des rayons solaires viennent s’habiller dans tes cheveux

Tu entrouvres la bouche, te relaies à la souche
Et tes yeux qui se fourchent me recherchent à la source

Tu te joues de l’instinct qui habite tes mains
Tu veux lire sur mes traits mes secrets volcaniques

Tu veux me voir trinquer
Tes lèvres veulent tremper et boire à ma santé

Tu es aux premières loges pour me voir arriver
Et dès lors que je suis sur le point de ta langue
Sur le point de venir
Tes commissures, mon ange
M’étreignent et m’ordonnent de jaillir

Tes yeux encanaillés me livrent à ton bûcher
Je signe ta victoire de grands tracés de jets

Big bang déployé
J’appartiens désormais à un nouveau cosmos
Constellé des étoiles de ton petit bracelet









L'ECHAPPEE BELLE


On l'aura notre échappée belle..

Je suis dans ta roue
Tu prends tout le vent de plein fouet
Tu te tournes vers moi
le visage inondé de cheveux affolés
et tu te mets à rire sans discontinuer
sous le ciel menaçant..

Le coeur bluesy,
serein
je m'étonne et je m'enchante
d'être à ce point vivant..

Nous ne sommes plus très loin
de chez nous
à présent









MELE-ANGES


Laisse-moi te laver doucement les cheveux
Voir ton âme glisser, s'assoupir peu à peu,
Et bientôt s'éveiller aux ondes de ta source
Dans un bain exalté de parfums et de mousses

A tes yeux caressants, laisse-moi m'arrimer
Planter l'ancre enlisée, dans l'instant éternel
Dans l'instant frémissant, de cantiques charnels
Je veux me mélanger aux couleurs que tu crées

Laisse-toi entraîner, aux abysses d’un rêve
Détrempé à ces nuits aux volutes sans trêve
Que j’aime voir tinter à tes grâces réelles

Offre-moi ce qu’aucune n’a songé à donner
Et reçois sous la lune les archanges d’été
Qui nous hissent éblouis jusqu’à l’ultime ciel










PETITE REVERIE DU MATIN


Dans sa grande chemise à rayures
un déhanché en guise de parure
  La belle traverse la pièce
sûre de son coup

Je la sais nue sous le tissus
Bleu Deauville et blanc
de haut en bas
dedans

Et je la suis déjà
dans son petit sanctuaire
où des clous de girofles
ornent sa cuisinière

Aux mouvements circulaires
de la cuillère en bois
la petite casserole
est déjà aux abois

Pieds délicats
jambes de soie
posture de cigogne
je jaillis sans vergogne

Me voilà dans son dos
sur son cou et bientôt
dans sa grande chemise

Bleu de Klein glissant
de haut en bas
dedans










HOLD UP


J'ai envie d'un hold up
Envie de te fouiller, de dévaliser ton corps,
venir dans ton dos, te parler sèchement à l'oreille,
te mettre en joue, puis à terre,
t'attacher, t'engueuler
te regarder crier en fermant les yeux sous les coups de pétard
jusqu'à contempler enfin
tout ce liquide sortir du fond des sacs..









INEFFABLE VERTIGE DES VICES INASSOUVIS


Ses couilles qui claquent à ton cul
Ta mouille qui laque tes cuisses
Le sang du mois répandu
Au blanc du drap des sévices

Vous en aviez envie
Il savait recevoir
Tu as passé trois nuits
A remonter la barre

Réclamant la saillie
Jusqu’à l’heure du départ
L’enfermant de chez lui
Sa clef dans ton bavoir

Sa queue d’un coup dans ton cul
Muqueuse à même muqueuse
Il crache sans retenue
Comme dans ta gorge poreuse

Qu’en dirait ton chéri
Que tu aimes plus que tout
Mais qui te contrarie
Qui t’a poussée à bout

Ses kiffs inassouvis
Sont du coup pour le loup
Qui te prend sans répit
Qui te prend sans tabou

A peine dix-sept ans
Cialys Thaïlandaïs
Speed & Poppers aidant
A tes abus d’excès

Je te rejoins bien là
A me sabrer la nuit
Toi qui servais le plat
Au-delà de l'envie

Urologie sous la douche
Photographie de ta bouche
Te revoilà sur le net
En caméra indiscrète

Caresses insidieuses
Sur soutien gorge brodé
Poitrine malicieuse
A chacun dévoilée

Crescendo langoureux
Sous lampe tamisée
Les loups mordent leur queue
Se perdent à te trouver

Reine de la défonce
Héroïne de la nique
La seringue s’enfonce
Et deux frelons te piquent

Sanglée comme animal
Qu’on veut tenir en joug
Tu roucoules ton râle
Etranglée dans la boue


Puis ma rencontre avec toi
A t'écouter larmoyer
Le sort accablant le roi
De noces non consommées










C'était un Jeudi soir sur une largeur de lit
Nuit où j'ai contemplé ton visage endormi
J'ai respiré ton souffle, pris un peu de ton âme
En moi s'est incarnée l'inaltérable flamme











A LA GRACE DE TON EMPIRE


Je cherche mes armes pour te conquérir
Recherche des armes à en dépérir

Je vois parmi tous mes amis
Un animal qui te ressemble
Je déteste ma jalousie
Et je m’éteins lorsque tu flambes

Je garde mes larmes derrière mes soupirs
Tarde dans mes larmes quand le soir m’aspire

Je vois parmi mes ennemis
Un arc en ciel qui me ressemble
Et qui bientôt se désassemble
Au souvenir d’un bon ami

Du fond de mon âme, je veux ton sourire
Au fond de mon âme, il manque un empire

Je vois venir en bout de nuit
Une fée familière qui semble
Entre mes mains trouver son nid
Et qui m’étreint lorsque je tremble

Rencontrer tes yeux, parmi les communs
M’a brûlé du vœu, d’y voir mon destin









LA FEMME-REFUGE


Je cherche un refuge,
Un havre isolé par la brise
Une vallée minérale, blanche comme l’instant
D’une harmonie parfaite entre les éléments

Je rêve de canyons délavés de lumières
De clairières paisibles aux sommets des enfers

Fais de moi un parfum sinueux, long courant ensablé
Rouge comme la terre des déserts massifs
Rouge comme les étoffes profondes, ivres d’Andalousie

Laisse moi m’enrouler dans les anneaux du vent
Survoler les reliefs de ton corps émouvant

Je cherche un domaine
La douceur d’une flore ondulant dans l’azur
Déployant ses pollens aux âmes tourmentées

Je veux m’abandonner à tes lianes aux nervures de plumes
Laisse-moi me répandre comme un lac fluide
Au diapason des pulsations
Des oraisons de tes pulsions

Fais-moi boire au parfum de ton cou
L’élixir qui sauvera mon âme fatiguée
Permets-moi de venir me cacher dans ta chevelure
Il me faut expier mes tensions
Somnoler près d’une source pure

Je viendrais alors m’enrouler dans les vapeurs de ton être
Espérant voir tes lèvres curieuses partir en promenade,
Et tomber en chemin sur celles du soldat
Chuchotant dès lors, dans tes bras providentiels
Ses plus secrets soupirs..
Fleur de nacre, offre moi ton haleine orangé
Je suis un animal en mal de chaleur

Je te donne la poudre
Pour que tes yeux dessinent leurs intenses désarrois
Dans les tréfonds –cavernes- de mon âme

Referme toi sur moi
Comme un coquille de mer sur un cristal de vent

Je veux aveuglément parcourir de mes mains tes surfaces sensibles

Nez à nez sur ton sein
J’y passerai ma joue
J’y poserai mes lèvres
J’y risquerai la main
-De féline à félin-

J’attendrai cet instant
Où chaque fleur volcanique
Jaillira en flammes de torrents
Et me prendra dans des griffes sublimes

Je veux sentir tes dents de tigre
m’attraper de plein fouet à la nuque

Révèle moi à moi-même
Sous tes doigts, je te laisse conjurer l’anathème

Couchons nous au milieu de l’infini rivage
Dans l’oblique de la tombée du soir
Et laissons le flux et le reflux de nos envies fantasques
Emporter les coquillages fêlés de nos amertumes
De nos questionnements et de nos angoisses

Devenons un paysage noble et scintillant
Narguons le cœur de la nuit d’un plus parfait cristal









ETERNEL INSTANT


Je rêve d’une chambre aux blancheurs épurées
Construction de drapés pris aux reflets de l’ambre
Pris aux flammes qui tremblent à tes yeux magnifiés
Comme fleur de rosée sous l’orage se cambre

Je voudrais déposer dans l’éternel instant
Sur ton ventre troublant ma pudeur insensée
M’enrouler comme un lierre à ton désir brûlant
D’absorber le tonnerre dans un fracas violent

Laisse-moi déployer cette ivresse animale
Qui vient s’abandonner sur ton épaule pâle
Dans ton cou s’engouffrer et s’offrir à trépas

O mourir et renaître comme chat du Népal
Te retourner, te mettre plus de sept fois sous moi
Jusqu’à me reconnaître au plus profond de toi









CREPUSCULE D'UNE REVERIE


Je t'ai regardée t'endormir dans ton coin..

Dans mes rêveries, il y avait eu des prairies,
des pétales de fleurs mélangés aux pollens,
- papillons rouges et herbes folles -
l'heure calme aux premières déclinaisons du jour..
Des faisceaux de soleil
venaient enrubaner ce gros chêne
où je t'imaginais adossée,
un léger sourire aux lèvres..

Dans les fantaisies du vent
nous nous serions laissés aller
à la douce ivresse de ce havre...









AMOUREUSE


Elle tombe amoureuse
Mieux qu'elle ne sait aimer
Et elle sait s'attacher
Mieux que d'être amoureuse









FEMMES DE MA MORT


La femme de ma vie
Ne me reconnait plus
Quand reviendra l'envie
Je ne l'aimerai plus

La femme de ma vie
Est choyée, que veux-tu
Je lui offrais ma vie
Contre son temps perdu

La femme de ma vie
Ne m'a pas convaincu
De garder en sursis
Son grand ami déchu

La femme de ma vie
Ne me regarde plus
Et je livre à la nuit
La flamme qui me tue









TALISMAN


Je te vois
Assise là
Tes yeux pris dans le lointain
Et je t'y rejoins
Malgré moi

Je me vois
Près de toi
Les yeux pris par le chagrin
Tu m'y as contraint
Malgré toi

Et lorsque tu t'en iras
Je te porterai déjà
Comme un talisman en moi

J'ai longtemps
Cru vraiment
Que nous aurions cet enfant
Qu'on s'inventait les
Yeux brillants

L'ironie
De l'amour
T'a gagnée au fil des jours
Mais m'a épargné
Sans détour

Et lorsque tu t'en iras
Je te porterai déjà
Comme un talisman en moi

Je ne retiens que mes pleurs
Je te souhaite le meilleur
Du plus profond de mon cœur









DELESTEE


Je regarde du port
partir un grand vaisseau
il frôle l'écume
vole au-dessus des eaux

Je regarde du port
ton immense sourire
qui me tourne le dos
qui disparaît bientôt
à l'horizon

Le soir vient se poser doucement
sur le ciel de septembre
Je tremble d'affronter le néant
de ma petite chambre

Mon seul chez-moi s'en est allé
je reste là à tituber
à m'entre-déchirer
de souvenirs bleutés

Accablé de fatigue
je m'endors près des digues
Je te vois habillée de célestes blancheurs
des étoiles par milliers comme des dames d'honneur
viennent pour te guider

Le petit jour hésite à rêveiller
quelques vieillards qui dorment sur les bancs
L'un d'eux a pris le large la nuit durant
Il a rejoint son rêve à tout jamais
ensorcelé









MARINE


Tes yeux débordent
Marine
Tes yeux débordent
Et quand tu m’abordes
Marine
Tu me sabordes
Et je m’incline

Ton cœur déborde
Marine
Ton cœur déborde
De tes jolis yeux
Mais tu tiens bon
Marine
Tu tiens bon
Du mieux que tu peux

Et je te regarde
Puis je te regarde
Et je me perds un peu
Dans quelques mers agitées
Mais je ne cherche pas terre
Je me laisse juste porter
Je m’en remets au vent
de ta valse marée









LE SOMNOLEUR


Offre-moi une nuit
De sommeil avec toi
Tu feras d’un banni
Le plus heureux des rois

Celui de qui tu jouis
N’a pas rêvé une fois
Comme je rêve chaque nuit
De dormir près de toi

Offre-moi une nuit
De gestes délicats
Ressuscite ma vie
Au sein de ton climat

Je ne sais me lasser
Du parfum de tes yeux
Des chemins familiers
De ton corps cotonneux

Offre-moi une nuit
De rêv’ries contre toi
L’émotion nous unie,
Comm' les voiles d’un haut mat

Quand bien même tu te plais
A vibrer pour un autre
Je meurs et je renais,
Je reste ton apôtre

Offre-moi une nuit,
Tu me délivreras
Je somnole une vie
Qui n’attend que tes bras









AUTO-PSY


On veut voir grand, beaucoup trop grand
dans des yeux grands comme les tiens
on se méprend bien trop souvent
pour des moments opportuns

Lorsqu'on croit voir une oasis
on imagine déjà la plage
Nous nous infligeons le supplice
de peindre nous-même nos mirages

Mais dans ces instants de bonheur
c'est notre désert qui s'efface
Un désert sans couleur
Sans chaleur et sans grâce

Souvent le désir
n'a rien de mieux que le besoin
souvent les vampires
ont de grands yeux pareils aux tiens

Sur le coup je m'indigne
mais mes dents m'égratignent
On oublie un peu vite
les tricheries tacites

On se relève
la fatigue dans le corps
de nouveaux rêves
nous traînent à notre sort

Des rêves trop vieux pour être vains
et beaux à pâlir
Souvent les vampires
ont de grands yeux pareils aux miens









GOTHICTALOPICIA


La fin du jour est proche
Mon désir ricoche
Jusqu'aux portes d'un lieu
Abandonné du ciel

Intenses vitraux bleus
Je vous dois le respect
Aucun de moi ne veut
Entrecroiser le fiel

Je suis seul parmi vous
A moins que dans mon dos
Un chuchotement doux
Murmure qu'il est trop tôt

Elancée de l'abside
Comme incarnée du soir
Une nymphe en toge noire
Se réclame d'un guide

Aux croisées du transept
Six autres femmes guettent
Une puissante aura
Prend possession de moi

Quatorze mains gracieuses
Cheminent, voluptueuses
Incendient dans mon sang
Les plus anciens volcans

La pénombre installée
Exulte à dévoiler
quelques troublants secrets
De la perversité









LE HARPON


Je vais à la pêche au regard
là, j’en tiens déjà un
porte-parole de tout un corps
en ébullition
Je t’ouvre ma boîte crânienne
Allez, plonge dans mon antre
Vois déjà, tu n’as plus en bouche
le goût de l’hameçon
sinon
celui du harpon

Petite sirène,
je chante de ta propre voix
ta fameuse chanson









MON DERNIER SECRET


Tout respire chez toi La féminité
Ca transpire en moi A en suffoquer !

Je veux voir ta main
Taillée dans la soie
Fouiller mon écrin
Sans égard pour moi !

Depuis tout ce temps Tu les séquestrais
Libère à présent Tes désirs secrets

Depuis trop longtemps
Tu es affamée
Montre moi tes dents
Je veux en baver !

Tout ton corps me broie De sensualité
Tes yeux me foudroient De flammes insensées

Ta délicatesse
est brutalisée
J’empoigne d’hardiesses
Tes fichus attraits

Ma délicatesse Est azimutée
Délivre à l’ivresse Mes foutus péchés !

Dans la flamboyance
Des jardins secrets
Notre décadence
Est un lien sacré

Et si le bas blesse En absurdité
Je livre sans reste Mon dernier secret









LUNE D’ELLE


J'ai sans doute croisé
Un jour dans Paris
La femme de ma vie
Sans la remarquer

La foule de Paris
Comme une mar ée
Garde dans son lit
Ses plus beaux secrets

J'aimerais savoir
Vaincre les remparts
Qui viennent le soir
Hanter ma mémoire

Il y a des regards
Qu'on rêverait
De garder le soir
Sur ses poignets

Cette nuit nos yeux
Tremblent et se blessent
D'échanger le voeu
D'une caresse

Je n'ose espérer
Croire ce que je sens
Ta couleur me plaît
Marque-moi au sang !









TA PEAU


Ta Peau constellée de songes
de papillons ineffables et de marécages fourbes
Me voilà enlacé à ta sérénité
je suis fou de ta quiétude !
Elle brille en chaque étoile qui coule lentement du ciel
pour s'enrouler sur toi comme un serpent sans yeux
tout assoiffé du sel exquis de tes instincts..
Ta peau irradie chaque secret de mon écorce
Ta peau ensommeillée au coeur même de l'écrin
-électrique et filandreux- de tes actes manqués
Ta peau, temple massif aux rosées de carats
Ta peau aux yeux centuples se répand sur le soir
Souterraines galeries de ton corps alangui
déverse ses parfums aux spasmes de tes reins
Je porte la morsure des fleurs carnivores
qui dorment sous ton derme, flamboyant à l'aurore;
Ta peau, tous tes écrins tressés, tes ports, tes flacons de rivages
tous tes drapeaux au vent, tes chansons chuchotées
Ta peau comme un radeau de sang sur un torrent de lave
Ta peau comme un cygne sans lac
comme une forêt de cris crépitant litanies
Magie !
Vertigineuse ivresse de ta nacre tannée
ta peau
ta peau étrangle ma trachée et coupe mon élan
mais je m'étends pourtant, je tends infiniment vers toi
ravalant le désir
le grand, le vrai désir est d'être ravalé !
comme la mer remonte à elle
comme l'écume explose avant de dire son nom
avant d'écrire son nom
sur les vapeurs de peau de la matière du temps
Laisse-moi dans l'instant prendre l'éternité
de tracer mon destin sur ton axe troublant









LES PETITS CHATS


Je sais ta férocité avec les sentiments
Lorsqu’il s’agit de les noyer
Comme des petits chats









Ma cocotte, je voulais juste te dire
Don Quichotte n’en finit pas de mourir










MES REVERIES

Aujourd’hui mes rêveries
vont à la femme mûre
qui a une amnésie
de la passion future









FLEUR DE L’AGE


Rose-Marie et son chapeau
affleurent
traversent le square
sans regarder le square

Partout l'été est là
partout
de jeunes femmes en fleurs
narguent la robe à fleurs
de Rose-Marie

De grands éclats de rires
blessent la dame au dos
une pie va surgir
un homme a son chapeau









L'ILE DE RE
-La flotte en Ré, fin septembre-


J’ai le cœur gros et plein d'images

Des rivages désertiques de Sablanceaux
au Bois-plage touristique
mais malgré tout si beau

Les patelins et les rues abandonnées
me laissent à ton reflux sans destinée

De joies surestimées en naufrages hideux
j'arriv' dans tes marées pour me laver les yeux

Ramener de La Flotte
un fromage de chèvre, une bouteille de vin
et ça me reprend, comment te dire ?
Je me sens affreusement bien
et affreusement seul près de toi

En longeant les chemins bordés de pins
puis vélo à la main à Saint -Martin …
Tout a l’air à la fois si vrai et inutile
et c’est si difficile à accepter

Je regarde septembre de ma petite chambre
Tel un fauve ensommeillé sur les terres
Son oeil mauve vient s'enrouler sur la mer

Tout à l’heure je descendrai avec le soir
pour venir te border
Et je resterai là
à contempler ton souffle









SUR LES COUPS DE MINUIT


Tu tournes autour de moi
Avec de grands yeux froids
Tu cherches
Tu me flaires
Tu me pistes

Je tourne autour de toi
Mes mains tièdes s’emploient
Se dispersent
Et se perdent
Sur tes pistes

Tu tournes une dernière fois
Ton corps blanc contre moi
Tu traces
Je laisse faire
Tu es triste

Je tourne dans ce coin là
Où tu n’habites pas
Je te cherche
Je me perds
Hors des pistes









NOCTURNE A CHOPIN


Les rues abandonnées
au milieu de la nuit
se souviennent en silence
de femmes épanouies

Leurs sourires, leurs grâces
et leurs charmes discrets
portent une robe immense
délicate et brodée

Dieu que leurs yeux sont tristes
et bercés de tendresse
lorsque le soir se glisse
au cœur de leur détresse !

Dans un coin de l'hiver
il trinque puis vacille
s'éprend des réverbères
qui célèbrent la nuit

Il songe aux grandes dames
aux rêveries laissées
près des lacs gelés
où dorment bien des âmes









JE T’EMMENERAIS

Je t'emmènerais dans un ranch traire des vaches
et regarder des chevaux d'enclos tourner sans fin au milieu de nulle part.
Je t'emmènerais longer des montagnes immenses,
partager le silence ébahi et cotonneux d'une contemplation émerveillée.
Je t'emmènerais fumer le cigare offert par un très vieux Cubain en gage de ta beauté.
Je t'emmènerais contre mon épaule sur un chemin de neige et de conifères,
sous un ciel épuré d'azur, dans les rayons déployés du soleil triomphant.
Je t'emmènerais dans les confidences de mes caresses incertaines,
lorsque ton grain de peau entrouvre mon âme comme un coutelas divin.
Je t'emmènerais chaque matin dans une rêverie légère
pour dégager mon corps empesé de mon lit vide.
Je t'emmènerais chaque jour comme un papillon de songe
déposerait les pollens du parfum de ta main.
Je t'emmènerais chaque nuit dresser le trois-mats des recouvrances,
déposer la blanche candeur de la grand voile
sur le parfum de mort de mes draps trop froissés.
Je t'emmènerais dans le regard de chacun de ces hommes
qui n'ont jamais échoué à jouir de ton corps et d'en abuser comme il se doit.
Je t'emmènerais dans les vertiges du jour, à la pâleur d'une lampe,
dans un miroir grimaçant et j'en détournerais mes yeux pour les fermer encore,
alors..
Je t'emmènerais dans une prairie de jonquilles, de coquelicots et de bleuets,
à déguster la brise dans les danses irréelles de ta robe diaphane, puis, ivre
du chant des oiseaux, sous les branches d'un gros chêne, je m'endormirais
pour toujours dans tes bras, bercé par la douceur des soupirs du printemps..
O, dans mes derniers instants, je t'emmènerais sur un ferry
pour le bonheur de ton sourire sous un bonnet de laine.
A l'autre bout du quai, on entrerait chez un vieil antiquaire, on sortirait de
la poussière quelques boites à musique abandonnées çà et là
par des femmes délestées de rêves trop usés..
Soudain, je reconnaîtrais la petite manivelle enfantine que tu m'avais offerte
et je me tournerais brusquement vers ton absence..
Bien vite, j'actionnerais le petit bras mécanique pour sentir le crochet acéré
de ma nostalgie remonter dans la chair de mes souvenirs..
Alors, depuis mon antichambre vide et sans écho,
j'entendrais bientôt remonter les galops de cet enclos perdu au milieu de nulle part..
..où je t'emmènerais..











CE N'EST PLUS MOI


Tu es assise à droite dans la voiture
Le soleil d'été borde la route
Ta fenêtre est ouverte et le vent ricoche à tes cheveux
Tu parles à ton homme

Ce n'est pas moi
Ce n'est plus moi

Quelqu'un sonne à ma porte
Ce visage me dit quelque chose
Tu me dis que je t'ai aimée un jour
Comme jamais je n'avais aimé quiconque
Que nous parlions de prénoms d'enfants en nous tenant la main
Que je te désirais à en devenir fou

Mais ce n'est pas moi, ne sois pas triste,
Ce n'est plus moi..

Tu es assise à la droite de tes enfants
La clarté du soleil d'automne s'est figée sur la nappe
Soudain, tu as comme le pressentiment qu'un être s'en est allé
et l'instant se passe
Tu es bien loin désormais de te demander

Si cela aurait pu être moi


Tu es assise à ma droite dans la voiture
Tu passes ta main dans ma nuque
Tu souris
Je regarde la route ensoleillée
Et je t'entends chanter
Tu ris tendrement

L'azur ne m'aura jamais semblé aussi pur









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